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Depuis 1991, les demandeurs d'asile en France n'ont pas le droit de travailler. Cette mesure date de 1991 -date à laquelle elle avait été prise par Michel Rocard- ne se justifie plus du tout aujourd'hui.

Dans quelles circonstances cette décision qu'il faut bien qualifier d'inique a-t-elle été prise ?

En 1991, personne n'osait imaginer la suite des évènements. Le premier ministre invoque les "délais très courts de traitement des dossiers de demandeur d'asile" par les services compétents [1]. Ces délais très courts (moins de trois mois) n'ont plus de raison d'être depuis longtemps[2]. Aujourd'hui le temps moyen estimé de l'attente de la réponse à l'OFPRA est supérieur à 200 jours soit plus de six mois. Si la demande est rejetée par l'OFPRA (ce qui est le cas dans 80%des cas) le demandeur d'asile peut se tourner vers la Cour Nationale du Droit d'Asile (CNDA) encore plus encombrée que l'OFPRA puisque les délais d'attente y dépassent les deux ans.[3] Pendant cette période les demandeurs d'asile n'ont pas droit au travail. Ils reçoivent pendant la durée d'instruction de leur demande d'asile une ATA devenue ADA ( allocation pour demandeur d'asile) d'un montant de 6,80€ par jour pour une personne seule (et 10.20 € par jour pour un couple) , soit 210.80 € par mois pour une personne seule (et 316.20 € par mois pour deux personnes) et peuvent être logés en CADA ou en CFDA pour les familles.

L'étranger qui a demandé l'asile n'a, en principe, pas le droit de travailler. Toutefois, il peut déposer une demande d'autorisation de travail lorsque l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) n'a pas statué dans le délai d'un an suivant l'enregistrement de sa demande d'asile, pour des raisons dont il n'est pas responsable.

Sa demande d'autorisation de travail est instruite selon les règles de droit commun applicables aux travailleurs étrangers. En particulier, la situation de l'emploi * lui est opposable.

Droit au travail durant l'examen de la demande par la CNDA

Le demandeur d'asile qui a formé un recours auprès de la CNDA contre la décision de rejet de sa demande par l'OFPRA, et dont le récépissé de demande d'asile est renouvelé, peut également déposer une demande d'autorisation de travail, qui est instruite selon les règles de droit commun applicables aux travailleurs étrangers. Ce droit lui est ouvert pendant toute la durée d'examen de son recours par la CNDA.

Comme pour tous les étrangers l'Etat en la personne du Préfet peut "opposer la situation de l'emploi" à toute demande : en clair il peut invoquer le niveau élevé du chômage dans son département ou dans sa région pour refuser de donner cette autorisation de travail. L'Etat fournit une liste de métiers ouverts aux étrangers par région. Cette liste est très "mythique " car dans toutes les régions le même métier est ouvert aux étrangers, celui de" pilote d'installation cimentière". Mais il n'y est pas question des métiers de bouche beaucoup plus accessibles et "moins" difficiles comme ceux de boulangers ou de bouchers...[4]

Mais aujourd'hui , alors que l'on est face à un taux de chômage de plus de 10% et que coexistent à la fois des demandes d'emploi non satisfaites ( c’est-à-dire des chômeurs qui cherchent un emploi) et des offres d'emploi non satisfaites non plus ( c’est-à-dire des entreprise ont des vacances d'emploi qu'elles n'arrivent pas à combler, elles recherchent des travailleurs) par exemple il existe un déficit important de Bouchers ou de boulangers[5].

Permettre aux entreprises d'embaucher des travailleurs étrangers pourrait avoir des avantages pour donner du travail à des nationaux. Il est facile de comprendre pourquoi : les gâteaux que peut fabriquer l'étranger (car ils arrivent souvent, presque toujours formés à un métier, ce qui rend insupportable le gaspillage que nous faisons en les laissant inoccupés) doivent trouver leurs clients et toute la logistique afférente au fonctionnement d'une économie comme la nôtre. La possibilité pour ces boulangeries de répondre à la demande permettrait de créer aussi par capillarité des emplois plus qualifiés de logisticiens ou d'employés.

La situation devient inextricable et profondément scandaleuse quand on sait que l'Etat exige de ces demandeurs d'asile une somme qui peut aller jusqu'à 600 euros en timbre fiscal pour que lui soit délivrée une autorisation (généralement provisoire) de séjour alors que le droit de travailler lui est refusé !! Nous sommes là en présence d'une escroquerie caractérisée qui pousse le demandeur d'asile sincère à pratiquer le travail clandestin. Le travail clandestin présente de nombreux dangers pour le demandeur d'asile : complétement démuni devant son employeur il est l'objet d'une exploitation éhontée. Il est aussi à la merci de ses compagnons quand il remplace clandestinement l'un d'entre eux, qui peut aller jusqu'à ne pas le payer pour le travail qu'il a fait.

Il faut faire cesser cette profonde injustice. Certes, la période n'apparait pas favorable eu moment où le chômage atteint en France des sommets et que sa courbe ne donne pas l'impression de s'infléchir. Mais dans un pays le travail n'est pas un gâteau d'une taille donnée qu'il faut partager entre les travailleurs. Seuls le pensent les idéologues du Front national et certains du Parti Socialiste. Les économistes l'ont observé depuis longtemps.

[1] Voici le texte du décret du Premier ministre

[2] Voir ici l'évolution du temps d'attente de la réponse à l'OFPRA

[3] Voir le bel article consacré au parcours des demandeurs d'asile dans Le Monde

[4] voir cette liste ici

[5] Il y a ainsi 2422 offres d'emploi de boucher à pourvoir sur le site "Indeed.com" et 1822 postes de boulanger. Sur le site de Pale emploi les chiffres sont similaires.

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